Coucou, les gens !
Je présente ici un petit texte que j’ai écrit il y a presque dix ans (je ne suis pas vieille, je suis précoce, c’est pas pareil). Je l’ai écrit d’une traite à 00 h 58, ce qui a été le seul moyen de calmer une crise de panique, pour ensuite l’enfouir pendant des années dans les confins de mon disque dur.
Mon anxiété refaisant des siennes ces temps-ci, je me suis dit que c’était le moment parfait pour le ressortir. Vous pouvez blâmer le manque de logique sur mon état émotionnel à l’époque 😀 (Ah, la vie d’étudiant…).
Ça m’avait encore une fois réveillée au milieu de la nuit, il était maintenant minuit cinquante-huit et je revivais une angoisse nocturne qui avait toujours accompagné des délires à demi-conscients depuis que j’avais l’âge de me poser des questions. Malheureusement, j’étais précoce, et me confinais donc dans un enfer de pensées rhétoriques depuis près de quinze ans.
C’est un sentiment insidieux, une impression presque malsaine, qui me pousse à penser que je ne finirai jamais rien. Manque de volonté, de temps, de talent, je me suis fait depuis mes dix ans un ennemi de la page blanche. Rien à faire. Je la côtoie tous les jours, toutes les nuits, et elle se fait plus présente à chaque fois que les Professeurs parlent de livres à lire. Par absence de temps, elle ne serait jamais remplie. Et la volonté est une flamme qui vacille à chaque fois que la page blanche lui donne un coup de vent. Le talent est une chose que je ne me permets pas d’avoir de peur qu’un jour quelqu’un dise que je ne l’ai jamais eu en premier lieu.
Ça me prend à la gorge et ça refuse de me laisser respirer, j’ai l’impression d’étouffer. La peur de n’arriver à rien me pousse à faire des choses que j’abandonnerai en cours de route parce que, de toute manière, elles n’aboutiront pas. Et puis je pense à un moyen de régler tout ça, et j’en viens toujours à me dire que c’est l’organisation du temps qui me fait défaut. Beaucoup trop de choses à faire à la fois, entre la réalité et ce qui se passe dans ma tête. C’est là que mon angoisse nocturne vient me rendre visite. Alors j’attends, je panique en silence, je veux trouver quelqu’un à qui en parler et finalement, je me rends compte qu’il n’y aura personne pour m’écouter.
C’est comme si j’étais sur un plan physique différent de celui des autres, superposé au leur. Des fois, il y a contact, mais la majeure partie du temps, tout me passe à travers. Les gens sont des paragraphes bien ordonnés les uns après les autres, et moi, je suis cette annotation dans la marge, qui n’a aucun rapport avec le texte, qui aurait plus de sens si elle était développée. Alors on la garde, au cas où, peut-être qu’un jour, elle voudra dire quelque chose.
C’est mes pensées, tout ça, elles sont complètement désorganisées. Je pense à ce que je dois faire, ce que je vais faire, ce qu’il faudrait que je fasse et ce que j’aimerais bien faire. Ça fait beaucoup de choses à penser, et penser ça prend du temps. Puis j’abandonne et j’en viens aux histoires, et j’ai toutes ces idées qui arrivent en même temps, qui se divisent, se superposent, refusent obstinément de prendre un ordre linéaire. Impossibles à tenir en place, elles changent constamment. Et là encore, le temps vient me narguer. Établir toutes ces idées dans un ordre chronologique ? Même les monstres à six têtes qui vivent dans mes cauchemars sont plus réalistes que ça. Si je ne peux pas organiser toutes mes idées, savoir dans quel ordre je dois les coucher sur papier, je ne vois pas comment je peux les écrire. Et la voilà à nouveau : la page blanche. C’est le pire, elle ne se pointe pas par manque d’inspiration, mais par une incapacité totale à penser une chose à la fois. Au final, je vais me coucher, et je pense toujours la même chose.
Ma tête est un bordel désynchronique.